#JDF épisode 4 : Acoustic Learning

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Quatrième épisode de notre série mensuelle « Le journal du formateur ». Ces articles seront l’occasion de faire le tour des galères que connaissent tous les formateurs, mais aussi de mettre en avant les meilleurs moments de ce chouette métier. Vous souhaitez vous aussi témoigner ? Ecrivez-nous : contact@sydologie.com

Avec mon collègue formateur, on passe beaucoup de temps à s’assurer qu’il y aura bien tout le matos nécessaire dans les salles de formation. Parce que quand tu découvres en arrivant que quelqu’un a confondu vidéoprojecteur et rétroprojecteur, wifi et oui-oui, ou paper-board et story-board (si si, c’est possible), faut avoir un sang-froid de pingouin et un grand sens de l’improvisation pour assurer le steak. Ok, on est formateurs, on gère les situations limites et notre puissance pédagogique n’en a presque pas, de limites, mais c’est quand même dur, parfois. On est pas des surhommes quoi.

High-tech

Pour cette formation-là, on était tranquilles : on nous avait réservé une salle de fou dans une grande école de commerce, ambiance sous-sol de Batman : un learning lab. Un LEARNING LAB les gars ! Bijou d’hyper-connexion, d’ultra-interactivité et d’ergonomie, joyau de technologie, de pédagogie et sommet du feng shui. 3 TBI, 8 écrans plats, 10 PC, 10 mac, le tout sans fil, sans tables et sans les mains. On était euphoriques.

C’était tellement beau qu’on savait pas où poser nos affaires : on avait peur de salir et de mettre le bazar tellement tout avait été pensé pour qu’on ait besoin de rien… Mais comme on était pas mal en avance, quand les formés sont arrivés on avait eu le temps de s’habituer. On avait dompté les machines, on allait taquiner de la télécommande unique, faire ronfler les TBIs et tout synchroniser avec nos ordis : ça allait être grandiose. La barbe de mon collègue fristouillait, signe de grand enthousiasme.

Black out

On a commencé sur les chapeaux de roue : extinction des lumières par claquement de doigts, lancement de vidéos successives sur différents écrans, zooms contrôlés à distance… on était au sommet. On avait dit aux formés de bazarder leurs ordis portables et d’utiliser ceux de la salle qui allaient à fond la caisse. Mon collègue ajoutait en live des dessins faits main sur une vidéo qui défilait. Ses gribouillis aléatoires (ses compétences en dessin sont discutables) étaient instantanément transmués en formes parfaitement équilibrées. C’était tellement digital ! J’ai cru qu’il allait se dématérialiser mon collègue, et laisser son hologramme discutailler pendant qu’il irait boire un café à la machine. A un moment, j’ai moi-même failli me téléverser. On batifolait dans un bain de jouvence pédagogico-numérique. Notre propos était limpide, et nos formés buvaient nos flux et nos activités avec des étoiles dans les écrans. C’était beau. Ça a duré 2h cet état de grâce.

Tout s’est arrêté d’un coup. Rideau. Merci au revoir. Tous les écrans se sont éteints, les lumières aussi, et notre état de grâce avec. Il faisait un temps nul donc sans les lumières ça faisait tout de suite sinistre. On est sortis dans le couloir pour voir si y avait que notre learning lab qui s’était endormi. C’était général : y avait plus de jus nulle part apparemment. On a lâché trois blagues et demie en attendant que ça revienne. Puis quelques autres. C’est jamais revenu. Coupure de courant générale dans tout le quartier. Impossible de terminer le boulot qu’on avait commencé à faire faire aux formés sur les ordis. Impossible de montrer le logiciel qu’on voulait présenter. Impossible d’utiliser notre support de présentation.

On a fait un tournoi de rami.

Machina homini lupus est

Un incident de ce genre est vite arrivé. On gardera donc à l’esprit qu’il n’est pas prudent de mettre tous ses œufs dans le même panier, fût-il digital :

  • prévoyez toujours quelques activités analogiques en lien avec votre sujet ; bien sûr, vous ne pouvez pas inventer à chaque fois une version papier de vos formations : pensez-y juste un tout petit peu pendant que vous êtes en train de préparer ;
  • autant que faire se peut, demander aux formés d’arriver avec leurs propres ordinateurs et servez-vous-en ;
  • charger en continue les batteries de tout ce qui peut être chargé ;
  • si votre voiture de fonction est une camionnette, ou si vous connaissez bien tous les chauffeurs de bus, apportez votre propre groupe électrogène

 


 

Aurélien Dorvaux

  • Master « Métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation » – Certifié de lettres modernes

Après huit années passées à réfléchir aux meilleurs moyens d’enseigner le français à des collégiens et des lycéens, j’ai eu envie d’utiliser mes savoir-faire et de prolonger mes réflexions sur la pédagogie dans un autre contexte. J’aime m’interroger sur les mécanismes qui conduisent à la compréhension et sur l’apprentissage. Et comme tous les sujets m’intéressent, je trouve chaque jour chez Sydo de quoi satisfaire ma curiosité !

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