#JDF épisode 3 : Encéphalogramme plat

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Troisième épisode de notre série mensuelle « Le journal du formateur ». Ces articles seront l’occasion de faire le tour des galères que connaissent tous les formateurs, mais aussi de mettre en avant les meilleurs moments de ce chouette métier. Vous souhaitez vous aussi témoigner ? Ecrivez-nous : contact@sydologie.com

J’avais la méga-patate ce jour-là : ma formation était béton, j’avais dormi sur place la veille dans un hôtel une étoile et demi à deux vrais pas de la salle de formation pour être sûr de pas arriver en retard, les viennoiseries était idylliques, j’avais 12 couleurs de feutres différentes pour écrire sur un tableau blanc flambant neuf et j’avais même pensé à apporter ce satané adaptateur VGA/mini-display habituellement éternellement oublié pour raccorder le vidéoprojecteur à mon mac. Toutes les conditions étaient réunies pour que je leur en mette plein les mirettes. Bim.

Formation Sahara

La formation commence : j’entame mon amorce pour capter l’attention des apprenants par un petit paradoxe bien senti qui va leur retourner les méninges et leur ouvrir les chakras. Au terme de ma décapante introduction, enthousiaste, survolté et extatique malgré l’heure matinale, les yeux brillants, j’invite les participants et les participantes à réagir : rien. Il est trop tôt, je les prends à froid, quelle maladresse ! je continue à problématiser mon sujet, jonglant avec une poignée de documents hyperpertinents, et leur laisse le temps de se réveiller pour de bon. Alors ? Et maintenant ? Toujours rien. « Waterloo, Waterloo, Waterloo, morne plaine »… Je commence à me sentir un peu seul. Mon système serait-il grippé ? Je m’accroche et je me lance dans l’explication d’une activité drôle, ludique et ultra-pédagogique que j’ai imaginée. Si avec ça ça ne démarre pas…

 

Ça n’a pas démarré. J’ai ramé toute la journée pour leur tirer quelques vers et j’ai fini par les interroger par leurs prénoms tour à tour comme à l’école. C’est pas qu’ils étaient pas sympas, pas du tout. Et puis ils étaient attentifs et tout. C’est juste qu’ils étaient pas d’humeur participative, ou que c’était même carrément pas leur truc dans l’absolu à tous les 8 de se manifester oralement. Ils préféraient ne pas trop parler. C’était un peu pas de bol parce qu’il faut reconnaître qu’y avait pas beaucoup de probabilités pour que ma formation regroupe 8 personnes quasi-mutiques : mais si, c’était bien ça qui s’était passé. Maudites statistiques.
Ne soyons pas de mauvaise foi néanmoins : à un moment, y’en a un qui s’est lancé dans une tirade d’au moins 6 mots je crois bien.

Rester hermétique à l’hostilité apparente du milieu

Parfois, les formés n’arrêtent pas de parler, des débats passionnés s’engagent tous azimuts sur des sujets qui n’ont pas forcément grand-chose à voir avec le thème de la formation, et on finit par parler histoire du Proche Orient ou philosophie allemande en oubliant de faire ce qu’on avait prévu…
A d’autres moments, on a l’impression d’être devenu M. Wicker, le prof de maths qui terrorisait tout le collège et qui faisait saigner du nez les plus impressionnables. Que faire dans ces cas-là ?

  • multiplier les activités en petits groupes en redoublant d’ingéniosité pour inventer en direct
  • inviter les formés à prendre le temps de noter leurs idées lorsqu’on leur demande de réfléchir à un point en particulier : on aura ainsi l’assurance qu’ils auront quelque chose à dire au moment où on leur donnera la parole
  • ne pas céder à la tentation de parler 3 fois plus que d’habitude en faisant à la fois les questions et les réponses : certaines idées brillantes peuvent émerger du silence…
  • garder confiance : si ce genre de situation peut entraîner une autocritique bénéfique, nul besoin de passer la journée à se flageller ni d’entamer une thérapie le soir-même !

Enfin, pas forcément.


 ,

Aurélien Dorvaux

  • Master « Métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation » – Certifié de lettres modernes

Après huit années passées à réfléchir aux meilleurs moyens d’enseigner le français à des collégiens et des lycéens, j’ai eu envie d’utiliser mes savoir-faire et de prolonger mes réflexions sur la pédagogie dans un autre contexte. J’aime m’interroger sur les mécanismes qui conduisent à la compréhension et sur l’apprentissage. Et comme tous les sujets m’intéressent, je trouve chaque jour chez Sydo de quoi satisfaire ma curiosité !

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