Idiocracy, dans la vraie vie ? (partie 1)

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Idiocracy est un film dystopique (soit l’inverse d’un film utopique, ici on dépeint plutôt un futur peu enviable) et satirique américain réalisé par Mike Judge datant de 2006. Le réalisateur y décrit une société devenue « idiote », détruite par le capitalisme, la surconsommation, la surpopulation, le changement climatique et le rejet des intellectuels. Les personnes deviennent de plus en plus bêtes, notamment sous l’effet d’un indice de fécondité très important des « idiots », entraînant inévitablement une chute drastique du quotient intellectuel (ou QI).
 


 
Alors pourquoi parler d’Idiocracy sur Sydologie ?
Déjà, car ce film est culte et la caricature proposée peut amener à réfléchir sur certaines dérives de notre société. Mais surtout, parce que plusieurs journalistes et « scientifiques », via des études et articles, nous alertent sur une supposée chute importante du QI dans les sociétés dites « développées » (et cette chute ne daterait pas d’hier !). Ce serait le cas notamment en France, avec une baisse de 4 points entre 1990 et 2009 d’après certains « spécialistes ». Et ce phénomène aurait même un nom : « l’effet Flynn inversé » (ou « l’effet Flynn négatif »).

Mais avant d’évoquer l’effet Flynn inversé, qu’est-ce déjà que l’effet Flynn ? Sommes-nous vraiment tous en train de devenir « idiots » ? L’intelligence, c’est quoi au juste ?

Toutes ces questions existentielles méritent une réponse approfondie, et seront donc traitées en plusieurs articles sur les prochaines semaines.

Mais une chose après l’autre, occupons-nous déjà de l’effet Flynn… On commence ?
 

L’effet Flynn

 
Le QI moyen des individus augmenterait à chaque génération : c’est en tout cas ce que semblent démontrer les recherches de James Robert Flynn. Né à Washington en 1934, Flynn était professeur émérite en sciences politiques à l’Université d’Otago, à Dunedin, en Nouvelle-Zélande. Ses travaux, qui portaient principalement sur l’intelligence et son évolution, sont mondialement reconnus et débattus. À tel point qu’il a donné son nom au phénomène qu’il a lui-même identifié : l’effet Flynn.

Grâce à une méta-analyse publiée en 1984 et portant sur 73 études américaines couvrant une période de plus de 46 ans, Flynn montra en effet (et ce fut confirmé par de nombreuses études a posteriori) que, de génération en génération, les résultats aux tests de QI ne cessent de croître. Ainsi, au XXème siècle, le QI moyen avait par exemple augmenté de 3 à 5 points tous les 10 ans environ aux États-Unis. Flynn étendit son étude à 14 autres pays dits « développés » pour confirmer sa thèse de départ, et constata que dans ces pays, le QI s’était élevé en moyenne de 3 à 7 points par décennie.
 

 
La hausse semble donc générale, tous pays et toutes tranches d’âge confondus (après, pour ce qui est de ce qui se passe dans chaque tranche d’âge, on en reparlera plus tard…), à des rythmes plus ou moins élevés.

Par ailleurs, des évolutions assez similaires ont été identifiées pour des tests liés aux capacités d’attention et à la mémoire.
 

Comment sommes-nous devenus plus « intelligents » ?

 
Dur à dire ! De nombreuses hypothèses ont fleuri au cours du siècle dernier, avec plus ou moins d’assise scientifique pour expliquer pourquoi nos résultats aux tests de QI seraient en croissance constante. Voici quelques-unes des hypothèses formulées, rationnelles pour la plupart, loufoques pour certaines, mais globalement toutes complémentaires :

La chute drastique des accidents obstétricaux, qui peuvent engendrer une mauvaise oxygénation du cerveau et donc des séquelles irréversibles sur notre « intelligence ».

La diminution des carences en iode, un élément chimique déterminant dans le développement du cerveau. D’ailleurs, saviez-vous que l’origine de l’expression « crétin des Alpes » est à chercher de ce côté-ci ? En effet, de nombreux enfants dans les Alpes (et dans d’autres régions reculées, comme les hautes-montagnes) souffraient d’importantes carences en iode du fait de leur alimentation, ce qui les rendait plus exposés à ce qu’on appelait à l’époque « le crétinisme » (ou « insuffisance thyroïdienne congénitale »), un ensemble de troubles physiques et mentaux qui peuvent être liés à une carence en iode. Attention, crétin est devenu depuis une insulte.

L’amélioration des conditions de vie, au niveau de l’alimentation, de l’habitat, de l’accès la santé ou encore de l’hygiène. Le recul de la pauvreté est ainsi souvent désigné comme l’une des causes principales permettant d’expliquer l’effet Flynn.

Les progrès au niveau des systèmes éducatifs (accessibilité, durée de scolarité obligatoire, progrès au niveau des méthodes et des résultats). Les activités scolaires (et préscolaires) sont également davantage centrées sur la résolution de problèmes plus ou moins complexes, aidant ainsi les individus à être plus performant aux tests de QI.

L’implication croissante des familles dans l’éducation de leurs enfants est aussi avancée comme facteur pouvant expliquer partiellement la croissance du QI moyen. De plus, les parents ayant reçu eux-mêmes une « meilleure éducation », ils seraient mieux à même de développer les compétences intellectuelles et cognitives de leurs enfants.

La croissance de la stimulation cognitive liée au chamboulement de notre vie quotidienne et de nos environnements professionnels et personnels, notamment du fait de l’utilisation accrue de technologies. Ainsi, les êtres humains seraient à la fois plus stimulés et davantage confrontés à des problèmes complexes, ce qui leur permettrait de booster leurs résultats aux tests de QI.

– Enfin, des causes génétiques ont pu être avancées pour expliquer l’effet Flynn. L’être humain, durant le XXIème siècle, aurait ainsi muté au niveau génétique pour être plus performant. Nous serions devenus des « super-humains ».
 

Et l’effet Flynn inversé dans tout ça ?

 
Maintenant qu’on a tous bien compris ce qu’était l’effet Flynn, penchons-nous sur l’effet Flynn inversé. Sommes-nous vraiment moins intelligents qu’il y a 10 ans ? En France, mais aussi dans tous les pays dits « développés » ? Mais d’ailleurs, ça veut dire quoi être intelligent ? Qu’est-ce que mesure le QI, au juste ?

Clairement, il y a trop de questions et plus assez de temps. On se retrouve donc la semaine prochaine pour la suite des explications… Tâchez de ne pas perdre trop de points de QI d’ici là !
 
 
 
 


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Aymeric Debrun

  • Diplômé de Sciences Po Lyon – Master Coopération internationale et aide au développement

Découvrir un domaine inconnu, une nouvelle idée, une information ignorée. Se mettre à lire, étudier, analyser, comprendre. Puis approfondir, creuser, se passionner. Et enfin intriguer, intéresser, expliquer, transmettre. Et recommencer.

Un chemin maintes et maintes fois parcouru aussi bien dans ma vie personnelle qu’étudiante. Chez Sydo, j’ai trouvé un travail pour continuer à l’arpenter et faire de ce chemin… un schéma pédagogique.

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