Quelques recommandations pour gérer l’attention de nos apprenants

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Je ne sais pas si vous avez remarqué mais, ces derniers temps, il se pourrait que j’aie écrit quelques articles sur l’intelligence artificielle. Aujourd’hui, je pense qu’il est important de recentrer un peu le sujet sur la psychologie et l’apprentissage. Les différentes menaces de mes collègues ont un peu aidé je l’avoue (je crois qu’ils ont peur pour leur emploi, ces pleutres).

Aujourd’hui, j’avais donc envie de vous parler de l’attention. C’est l’un des concepts centraux de ma thèse et j’en ai finalement très peu parlé. Je trouve ce concept particulièrement intéressant, car en réalité, un grand nombre de processus cognitifs passent par l’attention. L’attention joue notamment un rôle crucial dans notre capacité à traiter l’information et à la retenir en mémoire, bref d’apprendre.

Ce qui est intéressant, c’est que l’on sait tous ce qu’est l’attention, au sens où l’on l’expérimente tous les jours : “Ah mince je n’ai pas fait attention à ce que tu disais Youri, sûrement parce que tu as parlé trop longtemps” ; “Excuse-moi Youri mais c’est quoi ce cheveu sur ta tête ?” ; “Désolé Youri, j’ai pas fini de faire ton illustration, je faisais trop de choses en même temps”. Bref, grâce à ces exemples, on peut déjà dessiner une piste de définition.

L’attention, c’est notre capacité à se concentrer sur un élément, une tâche. C’est bien joli ça, mais il faut également pouvoir se concentrer sur une tâche pendant un certain temps, soutenir notre attention sur un élément.

Notre attention est donc soutenue

L’attention c’est aussi la sélection. Je ne prête pas attention à tout dans mon environnement, sinon, on serait très vite surchargés.

Notre attention est donc sélective.

La vie n’est pas toujours simple, et il faut parfois réaliser deux tâches en même temps. Nous sommes donc capables, dans une certaine mesure (pour approfondir, lire cet article sur le multitasking), de partager notre attention entre différents éléments.

Notre attention est donc divisée

On peut déjà à partir de ces trois composantes, formuler une définition plus ou moins complète de ce qu’est peut-être l’attention. Et en quoi elle est plus complexe et riche que simplement “se concentrer sur une tâche”.

L’attention peut être définie comme un processus cognitif qui implique la sélection, l’orientation et la concentration des ressources mentales sur des stimuli pertinents pour atteindre des objectifs spécifiques, et qui est associé à des réseaux neuronaux distribués dans le cerveau (Posner, Petersen, Fox, & Raichle, 1988). Bon, ok, j’ai un peu triché.

Mais alors, comment choisir les éléments auxquels il faut porter attention ? Pourquoi faire attention à mon cheveu sur la tête ?

On identifie généralement deux types de facteurs pouvant avoir un impact sur le déploiement de notre attention : les facteurs endogènes et les facteurs exogènes.

Les facteurs endogènes

Comme son nom l’indique si clairement, ils correspondent à l’ensemble des facteurs internes à la personne : les buts (je veux prouver que Youri n’est pas vraiment chauve), la fatigue, l’expérience (j’ai une peur bleue des chauves), la culture (il y a des différences significatives entre les pays européens et l’Asie sur notre façon de gérer l’attention), etc. En tant que formateurs, il est difficile de jouer sur ces aspects, si ce n’est en les prenant en compte. Mais voici tout de même quelques recommandations :

Favoriser la motivation intrinsèque : proposer des activités intéressantes et variées qui permettent aux apprenants de se fixer des objectifs personnels pour mieux gérer leur attention.

– Tenir compte du niveau de fatigue des apprenants : proposer des pauses régulières, identifier quand les apprenants décrochent, penser la durée de formation, non pas en fonction du contenu, mais en fonction de nos apprenants.

Favoriser l’interactivité, la coopération, les activités et rendre actif l’apprenant

– Donner des outils pour aider les apprenants à gérer leur attention.

Les facteurs exogènes

Ce sont des facteurs externes à la personne qui peuvent attirer l’attention de manière involontaire, comme des stimuli visuels ou auditifs, des mouvements ou des changements dans l’environnement. Ces facteurs sont plus facilement contrôlables par les formateurs et les enseignants pour optimiser l’attention des apprenants (en distanciel, c’est un peu plus compliqué).

Voici quelques recommandations pour gérer les facteurs exogènes :

Penser l’espace de formation : aménager l’environnement de formation de manière à minimiser les distractions visuelles ou auditives, en utilisant des espaces calmes.

– Dans la même idée, essayer de gérer l’accès de vos apprenants aux technologies, les téléphones sont de vrais aspirateurs à attention.

Gérer la charge cognitive : proposer des supports de cours lisibles et bien structurés, sans trop d’informations en même temps, avec des images et des graphiques pertinents pour faciliter la compréhension et la mémorisation.

Pour conclure, l’on pourrait dire qu’un bon formateur est un expert de l’attention, c’est en réalité, sa matière de travail. On pourrait presque dire (et je dis presque), que le travail d’un formateur est essentiellement de gérer l’attention de ses apprenants.

Si vous voulez aller un peu plus loin sur ce sujet, mon directeur de thèse a écrit un article en français sur ce sujet qui est écrit pour des enseignants et des formateurs, une véritable mine d’or.


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Youri Minne

  • Doctorant en psychologie cognitive

Apprendre des connaissances c’est bien. Mais les transmettre, c’est encore mieux ! Ayant toujours été passionné par l’apprentissage durant mon cursus de psychologie, j’ai la chance d’écrire des articles de vulgarisation sur des théories scientifiques. J’espère ainsi, au travers de mes articles, transmettre mes connaissances avec la même passion qui m’animait lors de la découverte de celles-ci.

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 6 commentaires


  • Julien

    Bonjour,

    Peut-être un pb de syntaxe ici :

    Les facteurs endogènes

    Comme son nom l’indique si clairement, correspond

    –> Comme leur nom l’indique si clairement, correspondent ?

    – on comprend mais j’ai du m’y reprendre 😉

    Répondre

  • Pascal

    Suggestion : l’article (très intéressant) que vous citez à la fin est accessible sous ce format : https://s.42l.fr/zoV9oKHL
    C’est un peu plus propre, et pour le coup explicitement en accès libre 🙂

    Répondre

  • claire Vaillant

    Bonjour, j’aimerais beaucoup approfondir le sujet de l’attention en lisant l’article de votre Directeur de thèse. Où puis-je le trouver ?
    Merci
    Claire

    Répondre

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