Depuis quelques années, le numérique s’est imposé dans tous les pans de notre vie. L’intégrer dans l’éducation semble donc être une évidence pour tout le monde. C’est d’ailleurs un enjeu majeur du ministère de l’Education nationale et de l’Enseignement supérieur. Mais est-ce une si bonne idée ? Le numérique a-t-il vraiment une valeur ajoutée en termes d’apprentissage ? Cela doit-il conduire à un renouvellement des pratiques pédagogiques ?
Un fossé entre la société et le système éducatif
De nombreuses actions sont mises en place et des appels à projets innovants sont lancés par le ministère de l’Education nationale dans le but de généraliser les usages et de développer les ressources numériques pour l’école. De nombreux enseignants tentent alors de nouvelles expériences numériques dans le cadre de leur cours. Tout le monde semble unanime et reconnaît les bénéfices du numérique pour l’apprentissage. Pourtant, ces initiatives innovantes restent isolées et ne parviennent pas pour le moment à se généraliser. Un fossé important perdure entre la société, de plus en plus connectée, et le système éducatif, qui conserve un fonctionnement très académique. On peut d’ailleurs s’amuser de constater que certaines conférences sur la nécessité de la transition numérique à l’école sont données dans des dispositions très traditionnelles, par des conférenciers émérites qui s’appuient encore sur leurs éternelles notes papier et parfois sans support de présentation numérique.
Les raisons de ce décalage
Qu’est-ce qui explique les difficultés du système éducatif à évoluer ? Les enseignants se trouvent pour la plupart dépourvus face à cette transition nécessaire, à laquelle ils ne sont pas vraiment préparés. En effet, on leur demande d’intégrer dans leur enseignement des technologies qu’ils ne maîtrisent pas et cela en plus des fondamentaux qu’ils n’ont déjà pas toujours le temps d’aborder de manière approfondie. Les enseignants sont également confrontés au problème de l’équipement des établissements qui ne sont pas toujours en mesure d’investir dans des appareils numériques ou de fournir une connexion internet stable et sécurisée. Par ailleurs, le décalage entre l’immobilisme du monde de l’éducation et la rapidité d’évolution des technologies rend encore plus complexes le développement de projets scolaires innovants.
Les clés de la réussite
Il semble pourtant que certains pays aient réussi la transition numérique de leur système éducatif (la Finlande, les Pays Bas et la Corée notamment). Ces pays ont pour particularité d’avoir imaginé de tout nouveaux modèles pédagogiques pensés pour le numérique. Les difficultés actuelles du système éducatif français pourraient peut-être s’expliquer par le fait que l’on tente vainement d’intégrer les technologies numériques dans un modèle d’apprentissage qui s’est construit autour de l’usage du papier. En effet, le format actuel de l’enseignement – que soient la disposition des classes, les programmes scolaires, la formation des enseignants, les temps scolaires – n’est pas adapté aux usages numériques. Il faudrait repenser notre approche pédagogique dans son ensemble pour réussir à développer une école numérique pertinente et adaptée à notre société. Le rôle de l’enseignant doit par exemple être reconsidéré. Celui-ci ne doit plus seulement être celui qui transmet des savoirs aux élèves, il doit également être un médiateur. En effet, les élèves peuvent désormais accéder tout seuls au savoir grâce à internet. Le rôle de l’enseignant doit alors être d’accompagner les élèves dans leur découverte du savoir et de leur apprendre à rechercher de l’information, à reconnaître une information pertinente, etc. Il faut également que soient développées des approches pédagogiques qui répondent aux besoins de la société et qui correspondent aux pratiques d’aujourd’hui, par exemple des pédagogies mobiles, sociales ou collaboratives.
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