Bien parler pour un formateur, c’est malheureusement ne pas trop s’attarder sur ce qui a été rédigé en amont pour être attentif aux réactions de son auditoire. Le formateur ne doit pas lire ce qu’il a préparé et plutôt s’adresser directement à ses interlocuteurs. C’est une manière de faire vivre le discours. L’apprenant se verra bien plus impliqué que si on lui récite un laïus. On sollicitera plus intensément son écoute si l’on s’adresse à lui de manière authentique.
Je vous vois venir, il n’y a rien de pire que les injonctions du type : “Sois naturel ! Sois authentique !”. C’est assez fumeux et je suis d’accord avec vous. Plutôt que d’essayer de faire passer un message sans y voir un véritable intérêt, il vaut mieux se concentrer sur ce qui nous paraît crucial, ce qui rend votre prise de parole légitime. Il s’agit de prendre votre discours à l’envers : le plus important est en premier lieu, non pas ce que vous devez dire, mais ce que vous voulez dire concernant le sujet de votre formation. Par cette inversion, vous vous assurez de porter un discours convaincant : « … on ne peut réellement convaincre sans être convaincu soi-même… » (Article « élocution » de L’Encyclopédie, D’Alembert). Cette étape est importante pour incarner véritablement un discours. Les mots compteront alors moins que la manière dont vous parlez et la raison pour laquelle vous dites ce que vous dites.
Une prise de parole pédagogique vise, a priori, à provoquer un changement chez l’apprenant. Il faut pour cela laisser la place à un discours authentique mais aussi vivant. Que ce soit la mémorisation de nouvelles connaissances ou la mise en pratique d’un savoir-faire, le passage à l’acte se fera plus aisément si les échanges sont naturels. « Vous n’agirez pas sur les hommes si votre éloquence ne part pas du cœur » écrit Goethe dans le Faust.
Plutôt que de réciter un script que vous auriez préalablement rédigé, il peut être très bénéfique de laisser vos notes (que vous connaissez par coeur) de côté et dire plus spontanément ce que vous voulez dire : “Possède le sujet, les mots suivront”. Oui vous prenez le risque d’être moins précis dans vos propos, mais cela compte moins que la vivacité de votre discours qui s’adapte en temps réel aux préoccupations de vos apprenants. Nous connaissons les messages à transmettre, faisons-nous confiance pour les reformuler spontanément.
Si le formateur doit être spontané et vivant, il a également un ensemble d’informations à transmettre, “un message à faire passer”, un déroulé à suivre pour assurer l’ensemble de sa formation. C’est tout le paradoxe : le formateur est constamment tiraillé entre la nécessité d’adapter son discours pour créer un véritable dialogue avec ses apprenants, et l’impératif de suivre le déroulé prévu et remplir ses objectifs pédagogiques.
Vous devez être toujours prêt à rebondir sur ce que répondent vos apprenants. Cela suppose parfois de faire le deuil de ce que l’on a préparé. Mais ce que vous direz fera sens et vous vous assurerez de faire vivre vos idées.
Ah oui, aussi : Sydologie part en congés pour trois semaines. Faites de même. Reposez-vous bien pour revenir en pleine forme à la rentrée. Arrivederci.
Lire les autres articles de la série :
– Episode 1 : Le principe d’affûtage
– Episode 3 : Le principe de brièveté
– Episode 4 : Le principe de simplicité
La rhétorique du formateur – Episode 2 : Le principe de spontanéité (ou de l’art de réagir aussi vite que la mouche)
21 juillet, 2022 | Laissez vos commentaires
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