PEDAGOGO #46 – ANDRAS PETO

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Chaque lundi, nous vous proposons de voyager dans l’Histoire de la pédagogie, à travers les portraits des plus grand.e.s pédagogues et théoricien.e.s qui ont influencé nos modèles contemporains.
 

András Pető, c’est qui ?!

 

 
András Pető, né le 11 septembre 1893 à Szombathely en Hongrie d’une mère professeur et mort le 11 septembre 1967 à Budapest (oui, oui, il est bien mort le jour de son anniversaire, la guigne), est un médecin pédiatre hongrois.

Il est notamment connu pour avoir fondé la “méthode Pető”, appelée également éducation ou pédagogie conductive. Cette méthode est destinée aux personnes infirmes moteurs cérébrales (IMC) et a pour but d’autonomiser ces personnes et d’optimiser leurs capacités.

Le jeune András quitte la Hongrie et part étudier la médecine à l’Université de Vienne. Au fur et à mesure de ses expériences dans divers hôpitaux en Autriche, András Pető devient un neurologue chevronné. Il se spécialise dans le traitement des enfants atteints de paralysie cérébrale et propose une approche holistique afin de surmonter les difficultés liées à leurs handicaps.

Ainsi, il invente sa fameuse méthode dans les années 1940, initialement créée pour favoriser l’intégration des enfants IMC dans le milieu scolaire (sa méthode est maintenant utilisée pour tout patient porteur de polyhandicap, d’un handicap moteur dû à des liaisons cérébrales ou encore ayant un retard du développement psychomoteur).

Il développe en parallèle un centre spécialisé sur l’accompagnement des enfants IMC basé à Budapest qui accueille plus de 800 enfants.

Il est un des premiers spécialistes à considérer le handicap comme un challenge éducationnel et non pas seulement comme un problème “biologique” dont on envisageait auparavant uniquement un traitement médicamenteux ou thérapeutique. Il continue à travailler auprès des enfants jusqu’à sa mort en 1967 au sein même de son institut.
 

Et András Pető, quelles sont ses idées ?

 
La méthode Petö a pour objectif de développer l’autonomie fonctionnelle des enfants IMC afin de leur permettre d’accomplir toute sorte d’action de la vie quotidienne.

Les postulats de base sont les suivants :
– en dépit d’une lésion cérébrale, le système nerveux dispose encore des capacités de former de nouvelles connexions entre neurones au niveau du système nerveux. Ainsi, chaque individu, quel que soit son âge ou son potentiel handicap, a les moyens de se développer sur le plan cognitif.
– les enfants IMC ont la capacité d’accomplir certaines tâches en apprenant à contourner les barrières qui leur font face.

Ainsi Petö adopte une vision très positive des enfants handicapés qui se base non pas sur son ou ses handicaps physiques ou mentaux mais bien sur ses capacités à réaliser les actes quotidiens grâce à la mobilisation de toutes ses ressources (neuromotrices, sensorielles mais aussi cognitives) pour trouver et exploiter ce qu’il appelle des “chemins alternatifs”.

La capacité des enfants à créer de nouvelles connexions et ainsi à trouver des solutions pour contourner leurs handicaps peut être mobilisée à l’aide d’un processus éducatif actif correctement guidé par un “conducteur” ou une “conductrice”. L’objectif pour les enfants IMC est donc de trouver par eux-mêmes des stratégies pour résoudre chaque problème.

Les leviers pour réaliser cela sont la communication, les activités de la vie quotidienne et le développement à la fois du bien-être physique et psychique.

Le conducteur.rice, qui se forme pendant quatre ans via une formation pluridisciplinaire (volonté d’une approche holistique, où l’on prend la problématique dans sa globalité), évalue les compétences de chaque enfant et va adapter chaque activité suivant son/ses handicap(s) donc ses capacités. Le conducteur.rice propose aux enfants des buts réalistes afin de favoriser le sentiment de réussite.

Certains moments de la journée, comme le déjeuner, vont être organisés au milieu d’enfants considérés comme “valides” afin que les enfants IMC se confrontent à la société et adaptent leur comportement (cela rejoint l’idée d’inclusion qui a montré son intérêt pour beaucoup de handicaps). Chaque enfant appartient à un groupe dont chaque membre est porteur de handicaps proches avec les mêmes objectifs à atteindre afin de motiver chacun d’entre eux et de favoriser l’encouragement. La création d’un groupe permet la sociabilisation des enfants IMC et le développement d’interactions. Le rôle des parents est aussi primordial. Ils sont mobilisés pour soutenir l’enfant dans sa volonté de s’autonomiser en développant ses compétences et son inventivité.

La méthode Petö se développe dans de très nombreux pays à travers le monde, surtout depuis la fin de la guerre froide. Ainsi, il existe des instituts Petö en Angleterre, Nouvelle-Zélande, États-Unis, Canada, Israël, Japon, Allemagne ou encore en Belgique. Cependant, en France, elle n’est pas reconnue et ne bénéficie pas d’une très bonne image. Pourquoi ?

Cette méthode Petö ne représente en rien un remède miracle et les quelques études sérieuses ayant évalué cette méthode dite “alternative” n’obtiennent pas de résultats unanimes. En effet, d’une part les fondements théoriques sur lesquels se basent cette approche sont très minces. D’autre part, les bénéfices réels de cette approche sont contestables et n’ont pas ou très peu été observés dans la recherche.

L’efficacité de cette méthode manque donc de preuves et la base de recherche de l’éducation conductive est assez mince voire même parfois contradictoire. Si vous parlez anglais et que ce sujet vous intéresse, je vous conseille de lire cet article qui passe en revue un grand nombre d’expériences réalisées sur la pédagogie conductive : https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/02667363.2010.521309?journalCode=cepp20)

Certains spécialistes redoutent même d’éventuels préjudices au niveau physique et psychologique. En conclusion, les recherches doivent continuer quant au bienfait de cette méthode et de son emploi pour les enfants IMC.

Que peut-on donc tirer de cette méthode et de son application ? L’approche basée sur l’éducation pour permettre d’accompagner les enfants IMC est intéressante. Mais encore une fois, bien que parti d’une bonne volonté, une réelle expertise scientifique est toujours nécessaire.

Tout n’est bien sûr pas à jeter, et notamment concernant l’approche éducationnelle des troubles. Celle-ci a pu montrer son efficacité notamment la méthode ABA pour des enfants atteints d’autisme. Mais nous nous éloignons un peu du sujet. Peut-être pour un futur article ?
 

Quelques ouvrages sur András Pető à consulter :

– Gillian Maguire et Andrew Sutton, András Pető, Conductive Education Press, 2012
 
 
 


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Aymeric Debrun

  • Diplômé de Sciences Po Lyon – Master Coopération internationale et aide au développement

Découvrir un domaine inconnu, une nouvelle idée, une information ignorée. Se mettre à lire, étudier, analyser, comprendre. Puis approfondir, creuser, se passionner. Et enfin intriguer, intéresser, expliquer, transmettre. Et recommencer.

Un chemin maintes et maintes fois parcouru aussi bien dans ma vie personnelle qu’étudiante. Chez Sydo, j’ai trouvé un travail pour continuer à l’arpenter et faire de ce chemin… un schéma pédagogique.

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