D’après vous, est-il possible qu’une personne ayant perdu un bout de son cerveau suite à un accident puisse vivre normalement ou presque ? Et bien oui, comme vous vous en doutez ! (sinon, pourquoi écrire cet article ?!).
C’était le 13 septembre 1848 aux alentours de 16h30 lorsque Phinéas Gage, un contremaître des chemins de fer, s’est laissé distraire alors qu’il bourrait de poudre un trou de dynamitage. Une barre de 6 kilos et de plus d’un mètre de long s’est alors envolée et a traversé sa tête sous l’œil gauche, déchirant la face inférieure du lobe frontal de son cerveau et perforant ensuite le haut de son crâne.
Aussi bizarre que cela puisse paraître, Phinéas n’a jamais perdu connaissance après l’accident, malgré la violence du choc qui l’a fait basculer en arrière et tomber brutalement sur le sol. Seules quelques légères convulsions ont fait leur apparition, mais il s’est remis à marcher et à parler en quelques minutes. Le soir, il a même déclaré au docteur John Harlow qui arrivait pour le soigner « Je crois que vous allez avoir du boulot », tout ça en lui montrant son crâne.
Phinéas, différent ?
En 1849, le Dr. Henry Bigelow soumet Phinéas Gage à des tests sensoriels et moteurs. Il s’aperçoit que l’homme peut encore marcher, parler, voir et entendre. Bigelow en conclu donc que son cerveau est en bonne santé.
Cependant, dans la vie quotidienne, Phinéas semble changer de personnalité : déterminé avant l’accident, il devient capricieux et versatile, incapable de suivre une idée ou un projet et semble avoir perdu de l’empathie.
Le cerveau de Phinéas
En 1994, Antonio et Hanna Damasio, deux neurologues travaillant pour l’Université de Californie du Sud (USC) ont tenté de modéliser l’accident afin de mettre en évidence les zones endommagées du cerveau. D’après leurs recherches, les lésions concernaient les deux hémisphères, responsables de changements de personnalité importants.
En 2004, une équipe menée par Peter Ratiu, enseignant en neuro-anatomie à Harvard conclut que la barre n’avait pas pu traverser la ligne médiane du crâne et endommager l’hémisphère droit.
En 2012, un spécialiste en neuro-imagerie, Jack Van Horn confirme les travaux de Peter Ratiu mais précise que si une partie du cerveau a été endommagée, des connexions entre neurones l’ont également été, notamment des connexions entre les deux hémisphères.
Des découvertes sur le cerveau
Si plusieurs années auparavant les neurologues pensaient que les lésions cérébrales avaient des conséquences irréversibles, le cas de Phinéas Gage a contribué à montrer que le cerveau adulte est finalement flexible. Il est capable de s’adapter et de réapprendre des compétences perdues : c’est ce que l’on appelle la plasticité cérébrale.
Les neurosciences et les connaissances sur le cerveau évoluent sans cesse : les recherches sur le sujet et l’observation de cas cliniques, comme celui de Phinéas Gage, permettent d’en apprendre chaque jour davantage sur cet organe complexe.