En 2009, la Finlande a obtenu d’excellents résultats aux évaluations PISA, qui visent à mesurer les performances éducatives des pays (2ème mondial en Sciences, 3ème en lecture et 6ème en mathématiques, loin devant tous les pays occidentaux). Les journalistes et les chercheurs se sont alors penchés sur le modèle éducatif finlandais pour comprendre les raisons de cette réussite. Pour en savoir plus, je vous propose un petit voyage au pays des rennes et des aurores boréales…
L’élève au centre des préoccupations
Selon la conception finlandaise, c’est l’école qui doit s’adapter aux élèves et non le contraire. Cette différence de point de vue implique de se soucier de l’épanouissement de l’élève à l’école, de son intérêt pour les cours, voire même, disons-le carrément, de son bonheur ! Une conception qui, vue de France nous semble bien incongrue. Cette posture a une influence non négligeable sur la manière d’enseigner : le professeur utilisera différentes méthodes pour s’adapter à chaque élève jusqu’à trouver celle qui convient. Pour pouvoir exercer son métier correctement, il doit donc disposer d’une grande palette d’astuces pédagogiques pour pouvoir s’adapter à tous les profils.
Une évaluation rassurante
Les élèves sont évalués pour la première fois à 9 ans, de manière non chiffrée (on cherche seulement à déterminer si les compétences de base sont acquises ou non). Ensuite, jusqu’à 11 ans, ils ne subissent plus d’évaluation. Ainsi, durant l’équivalent de notre scolarité primaire, les petits finlandais ne subissent qu’une seule évaluation. Les savoirs fondamentaux s’apprennent donc sans le stress des interrogations.
Les notes chiffrées apparaissent à partir de l’âge de 13 ans. Mais là encore, le système finlandais s’avère particulièrement rassurant pour l’élève. Les notes peuvent s’échelonner entre 4 et 10. Le 0, associé à la nullité et au néant, est donc banni, ainsi que les notes très basses qui peuvent être déprimantes.
On peut pourtant se poser la question de la signification du 4 dans cette nouvelle échelle, qui a peut être acquis au fur et à mesure le caractère déprimant du 0. En revanche, l’amplitude réduite (seulement 6 points) permet de se positionner plus facilement : la notion est acquise ou elle ne l’est pas.
Une formation de haut vol
En Finlande, la formation des enseignants est extrêmement sélective : par exemple, 80 candidats sont reçus à la faculté d’éducation de Joensuu, sur 1200 dossiers proposés. Pour devenir professeur, il faut obtenir un master en science de l’éducation ou dans une matière spécifique (pour l’enseignement secondaire), étudier la pédagogie pendant 1 à 2 ans et passer 3 ans en tant qu’assistant dans une classe. Une fois le diplôme obtenu, les professeurs postulent directement auprès des établissements de leur choix. On peut supposer que ce mode de recrutement facilite l’implication des enseignants dans leur activité et dans la vie de l’établissement, car ils intègrent des écoles qu’ils ont eux-mêmes sélectionnées.
Un environnement de travail privilégié
Vues de la France, les conditions de travail des enseignants finlandais semblent, sinon idylliques, au moins idéales. Les effectifs des classes sont relativement légers (20 à 25 élèves), les enseignants disposent de matériel multimédia moderne (alors qu’on trouve encore des rétroprojecteurs avec des transparents dans certaines de nos classes), chaque département bénéficie d’une salle de travail avec une bibliothèque spécialisée. Par ailleurs, chaque professeur dispose d’un bureau personnel.
En dépit de ses nombreux atouts, la Finlande a dégringolé de la 3ème place à la 12ème place, lors du classement PISA 2013. Aujourd’hui, les Finlandais se demandent s’ils n’ont pas passé trop de temps à expliquer leur modèle aux autres pays. Sans le vouloir, ils leur auraient ainsi fourni les armes qui leur ont permis d’améliorer le score de leurs élèves. Le ministère de l’éducation a en tout cas prévu de redresser la barre et a immédiatement annoncé la création d’un groupe de réflexion pour proposer des pistes sur l’amélioration du niveau de ses écoles. Une réactivité dont nous pourrions nous inspirer !
Photo : classe de l’école Aarnivalkean Koulu, à Espoo / Source.
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Un commentaire
Dans un article du monde diplomatique, le journaliste Philippe Descamps explique l’origine de cette réussite.
En résumé, dans les années 1960, le système éducatif finlandais n’était guère plus brillant que le nôtre. Les redoublements, l’échec scolaire et les voies de garage étaient le lot de beaucoup de familles rurales ou ouvrières. En 1966, un Front populaire finlandais réunissant les Centristes et toute la gauche arrive au pouvoir avec trois grands projets de réforme : la santé, les retraites et l’éducation. Cette coalition gouverne jusqu’en 1987 et construit patiemment sa réforme de l’éducation instaurant un système sans classement, ni redoublements, avec un suivi personnalisé des enfants. Mais aussi, la gratuité des fournitures, la prise en charge du soutien scolaire, de la cantine, des dépenses de santé et des transports. Dans les années 90, les conservateurs cherchèrent à imposer le retour du privé et la mise en concurrence, les premiers résultats du rapport P.I.S.A. vinrent à point pour leur clouer le bec. Et le plus beau, c’est que ce service public n’est pas plus onéreux, puisque la Finlande dépense moins d’argent par élève du primaire et du secondaire que la moyenne des pays occidentaux, et beaucoup moins que les Etats-Unis ou le Royaume-Uni.
La réussite Finlandaise est donc le fruit d’une grande vision politique d’égalité et d’unification et un travail de longue haleine. Il n’y a pas de recette “magique ” finlandaise, qui pourrait faire “rustine” sur notre système, car il s’agit là simplement de courage, de volonté, de générosité politique et surtout d’une vision à long terme. Des ingrédients qui manquent cruellement dans la France actuelle.