Témoignage d’un prof passionné !

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On a tous eu au moins un prof qui nous a marqués, qui nous a appris à aimer une matière et à prendre du plaisir à se creuser un peu la tête ! Et bien, c’est ce type de prof que j’ai rencontré et dont je souhaite vous rapporter le témoignage, convaincue qu’il est toujours enrichissant de partager les expériences pour multiplier les sources d’inspiration !

Sylvère Matéos, 26 ans, est doctorant en économie de l’éducation et enseigne  la macroéconomie à Lyon 2. Passionné de pédagogie, il résume sa vision du métier de professeur par la célèbre phrase de Jean-Jacques Rousseau [1] :

« Jeune instituteur, je vous prêche un art difficile, c’est de gouverner sans préceptes, et de tout faire en ne faisant rien. »

Autrement dit, un bon pédagogue doit s’adapter à son élève (« gouverner sans préceptes ») et construire des situations d’apprentissage qui l’amènent là où il souhaite qu’il aille (« tout faire »), sans jamais se mettre à sa place pour apprendre (« en ne faisant rien »). Il est en effet nécessaire que la situation créée laisse l’apprenant libre de s’engager dans la démarche d’apprentissage pour qu’il s’approprie réellement le savoir qu’on lui transmet. Pour atteindre ce difficile équilibre, Sylvère Matéos construit ses cours sur la base de plusieurs principes.

Le premier est de toujours donner du sens à ses cours : il ne faut pas partir du postulat que le sujet intéresse forcément l’élève, il faut au contraire lui en expliquer l’intérêt pour lui donner envie d’apprendre.

Cela rejoint son deuxième principe, à savoir que « c’est par la curiosité que l’on peut stimuler les étudiants ». En effet, il estime que si chaque apprenant est différent, ils partagent tous un point commun : une curiosité naturelle. En éveillant cette curiosité (ou en la réveillant), on peut amener l’élève à vouloir apprendre, à entrer par lui-même dans un processus d’apprentissage.

Troisième principe : il est nécessaire d’être exigeant et de pousser l’élève à réfléchir et à développer son esprit critique. Pour encourager les étudiants à se dépasser, il est nécessaire de leur donner des incitations à travailler : « cela passe par des exercices accessibles car rien n’est plus décourageant que le sentiment de n’être pas capable de réussir. Il s’agit aussi de valoriser la réussite, car contrairement à ce que beaucoup de gens pensent, la motivation est une conséquence de la réussite et non un préalable ». Enfin la contrainte, sous la forme d’évaluations régulières par exemple, est aussi nécessaire pour l’apprentissage. En effet, les étudiants sont comme tout le monde, ils « optimisent ». C’est-à-dire qu’ils cherchent toujours à maximiser leurs plaisirs (les loisirs) et à minimiser leurs peines (le travail) car « on est tous curieux mais on est tous fainéant ! ».

Garder un haut niveau d’exigence a trois avantages. D’abord, c’est gratifiant pour l’apprenant, car « être exigeant c’est penser que l’autre est capable ». Ensuite, en étant stimulé intellectuellement, l’apprenant comprend et mémorise mieux parce qu’il réfléchit et ainsi s’approprie le sujet. Cela vaut pour l’ensemble des étudiants car « en dépit de ce que l’on pourrait croire, même ceux qui ne sont pas intéressés aiment être stimulés, être poussés, car personne ne le fait (…) ils en redemandent, car c’est valorisant de comprendre ». Enfin, baisser le niveau d’exigence, c’est baisser la valeur du diplôme obtenu. Or, « ce sont les diplômes universitaires qui permettent l’ascension sociale. Pour qu’ils servent à quelque chose il faut protéger leur valeur. »

Son dernier principe est de dédramatiser l’erreur. Pour apprendre, il faut accepter de se tromper, d’avancer par tâtonnements. Pour essayer de combattre la crainte de l’erreur, souvent assimilée depuis l’enfance (au sein de l’école, mais aussi de la famille), il n’hésite pas à reconnaître devant ses étudiants qu’il s’est trompé ou qu’il ignore la réponse à telle ou telle question. Certains professeurs ont l’impression que « leur légitimité est en jeu s’ils admettent ne pas savoir ». De ce fait, ces derniers limitent les interactions avec les étudiants, car permettre les remarques et les questions, c’est prendre le risque d’être contredit, de devoir justifier ses idées. Cela demande également d’apprendre à être assez flexible pour pouvoir dévier du cours prévu et à faire confiance à sa capacité d’adaptation et d’improvisation. Cela n’est pas toujours facile mais cela en vaut la peine car construire le cours avec les étudiants représente un réel avantage : « ils retiennent mieux, car on les force à penser en même temps que soi ». Dans cette logique de co-construction du cours, Sylvère Matéos préfère d’ailleurs écrire au tableau, plutôt que de rédiger son cours sur un PowerPoint qui impose un cheminement de pensée et diminue la prise de notes par les élèves.

Mais bien sûr le secret d’un bon prof, avant les principes et les méthodes, c’est de prendre du plaisir à enseigner. « Il faut toujours arriver avec le sourire et la bonne humeur, être enthousiaste et croire en ce que l’on fait ».

Le livre que nous conseille Sylvère Matéos : Moi j’enseigne mais eux apprennent-ils ? de Michel Saint-Onge.


[1] Phrase extraite de son traité de l’éducation Emile (Livre II) publié en 1762.

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